Je ne crois pas être une militante de l’allaitement. J’ai l’allaitement naturel et spontané. J’allaite comme on mange, on respire et on dort. J’allaite comme on aime. Parce que c’est comme ça et que ça ne pourrait pas être autrement. J’allaite parce que j’ai des seins, que la maternité y fait monter du lait et que mes bébés aiment ça.
Je n’ai pas trouvé de meilleure façon d’encourager l’allaitement qu’en allaitant, naturellement, partout, chaque fois que mes bébés en ont eu besoin. Qu’ils aient un mois ou deux ans. Qu’ils aient faim ou qu’ils viennent de tomber sur un genou. Qu’ils soient fatigués ou pas encore tout à fait réveillés. Je les allaite en jasant, en faisant un casse-tête ou en me faisant couper les cheveux. Je les allaite sur un fauteuil à vendre dans un grand magasin, dans la noirceur d’une salle de cinéma ou en plein soleil dans un banc de neige en ski. Je les allaite. Point. Et ça n’a jamais dérangé personne.
Je suis probablement à contre-courant… quoi que bien de mon époque! Mais souvent, mon époque me pèse avec ces biberons qu’elle continue de semer à tout vent. Pas que je veuille en voir disparaître toute trace de mon écran radar. Pas même que je veuille nier qu’ils soient encore bien présents dans la vie d’une majorité de parents de nourrissons.
C’est le fait que le biberon soit encore et toujours présenté comme la norme qui me chicotte: dans les livres d’histoires, avec les poupées qu’on offre à nos enfants, à la télé. Et rien ne vient contrebalancer ça.
Si on veut que les femmes allaitent, il faut leur présenter des images de femmes qui allaitent, ouvertement et naturellement, parce que ça fait partie de la vie. Il faut en croiser sur un banc de parc, au restaurant et dans une réunion de travail. Il faut en voir à la télévision. Il faut retrouver l’allaitement quotidien et ne plus s’en tenir à celui du congé de maternité, dépeignées, en pyjama, à la maison. C’est peut-être là que nous sommes rendus comme société?
Et qui sait… peut-être arriverons-nous, de cette façon, à percevoir l’allaitement de façon plus légère et moins menaçante. Peut-être même cesserons-nous de le voir comme une bonne action répondant à une recommandation de la santé publique et commencerons-nous à l’intégrer, à le sentir et le désirer dans nos cœurs et nos corps… et un peu moins dans nos têtes.